Projet de réaménagement de la place jean Anouilh

Quartier Bélisaire au Cap-Ferret | Épisode 01

PROGRAMMATION DU JARDIN JEAN ANOUILH par Jean-Paul Lebas*

Avant de concevoir le dessin du futur jardin public, il y a lieu de passer par une étape préalable de « programmation » : il s’agit d’une part de bien saisir le contexte urbain dans lequel va s’insérer le futur jardin public, son histoire et sa géographie, et d’autre part de déterminer les usages du lieu que le maître d’ouvrage (les habitants et leurs élus) souhaitent voir s’y développer.

LE CONTEXTE HISTORIQUE ET géographique

Du fait de sa difficulté d’accès par voie de terre, la presqu’île du Cap Ferret est restée longtemps un lieu accessible uniquement par voie maritime par quelques ostréiculteurs, des pécheurs en mer et des chasseurs passionnés. De résidents occasionnels, quelques-uns s’y installent pourtant peu à peu de manière permanente, constituant plusieurs villages échelonnés le long de la péninsule : la Pointe aux chevaux, L’Herbe, La Vigne, Petit et Grand-Piquey, Les Jacquets…

Débarcadère de la liaison avec Arcachon, la première jetée en bois de Belisaire a été construite en 1877. Elle a pris comme dénomination « Bélisaire », surnom de Léon Barthélémy Daney (1863-1913), marin pêcheur de Gujan-Mestras, reconverti en aubergiste dans ce quartier du Cap Ferret et qui participa financièrement au débarcadère et au premier tramway. Les premières liaisons maritimes régulières de marchandises et de passagers avec Arcachon étaient assurées à partir de 1902 par le steamer, Le Courrier du Cap, créées par l’entreprenant Léon Lesca.

Bélisaire, c’est aussi, à partir de 1895, le quartier du « tramway », tiré par des chevaux, afin de relier le débarcadère à l’océan, tramway devenu depuis le « Petit Train » du Cap Ferret.
Bélisaire, c’est bien entendu aussi le quartier de la célèbre « Villa des Pêcheurs » construite au tout début du 20ème siècle et que Jean Anouilh acquit en 1957.
La villa des Pêcheurs, au Cap-Ferret, inspira ses fables à Jean Anouilh comme le raconte Marine de Tilly dans son article à ce sujet.

L’évocation de ces différents épisodes de la vie du quartier de Bélisaire montre toute l’importance stratégique de ce quartier pour la Commune de Lège Cap Ferret et impose donc que le réaménagement du jardin Jean Anouilh tienne compte de cette histoire.
REAMENAGER : POUR QUELS USAGES ?

Le Conseil Municipal du 24 janvier 2019 a inclus dans son budget d’investissement 2019 un montant de 199 000 € pour « l’aménagement de la Place jean Anouilh ».

Nous ne connaissons pas la teneur des débats et réflexions qui ont mené à cette décision, mais les travaux ont fait l’objet d’un appel d’offres en lots séparés (voirie, éclairage public, mobilier urbain et aménagement paysager) lancé le 4 février 2019.

Les travaux devaient démarrer en janvier 2020, mais le mécontentement des riverains (ainsi que de Nicolas, le fils de Jean Anouilh) ont conduit à abandonner le projet.

Cet épisode constitue donc une bonne opportunité pour la Municipalité de mettre en chantier une vraie réflexion sur la programmation de ce lieu, avant de ré-investir dans une nouvelle conception urbaine et paysagère. Cette réflexion devrait se fonder notamment sur les avis émis par les habitants, en tenant compte bien sur des contraintes administratives et des servitudes existantes.

Le jardin Jean Anouilh, lieu majeur du Cap Ferret, car situé au carrefour de nombreux flux (Océan-bassin, débarcadère-secteur des commerces, voies cyclables et de randonnées, plages, …) peut accueillir de nombreux usages très divers susceptibles de renforcer encore l’attractivité du Cap Ferret et le bien-être de ses usagers :

• Usages récréatifs, notamment pour les enfants,
• Secteur de passage d’un lieu à un autre,
• Lieu de détente et de repos,
• Développement du lien social et de la mixité urbaine,
• Démonstrateur du patrimoine local (histoire, géographie, culture maritime, ostréiculture, faune et flore),
• Familiarisation des visiteurs avec les spécificités du lieu.

Il semble clair que tous ces usages potentiels ne pourront être réunis dans un espace d’un peu plus de 5 000 m2, mais la fonction de « lien » entre l’océan et le bassin, le Petit Train, le Débarcadère et le secteur commercial du Boulevard de la Plage devra être mise en valeur.

Dans cette mesure, la restauration de la « rue de la Plage » en tant qu’espace public qui permet ce lien prend toute son importance : l’un des propos du projet de jardin Jean Anouilh devra consister à la fois à maintenir de façon satisfaisante l’activité des restaurants qui jouxtent le jardin, tout en permettant le passage du public.

* Jean-Paul Lebas, urbaniste
jean-paul.lebas6@orange.fr